Nos volontaires témoignent ! Entretien avec Theara Sroeurn, volontaire cambodgien à Strasbourg

« Le volontariat est à mon sens un chemin qui peut m'aider à saisir de belles opportunités dans le futur »

— Theara Sroeurn, volontaire

Voilà un mois que Theara Sroeurn, jeune cambodgien de 24 ans, a rejoint les équipes de Grand Est Solidarité & Coopérations pour le Développement (Gescod) à Strasbourg pour un Volontariat en Service Civique de réciprocité d'une durée de 7 mois, dans le cadre du programme REVER Cambodge (Renforcer l'Ecosystème du Volontariat, de l'Engagement et leur Reconnaissance au Cambodge) de France Volontaires. Ce projet doit notamment permettre la reconnaissance des métiers de l'engagement au Cambodge par le renforcement des capacités de la jeunesse et du réseau national de volontariat cambodgien. Cette année, 5 jeunes cambodgiens ont pu bénéficier de ce dispositif, dont Theara, qui nous en dit davantage dans un entretien sur son parcours, ses engagements et ses attentes pour les mois à venir au sein de Gescod.

Quel a été ton parcours éducatif, professionnel et associatif au Cambodge, avant ton arrivée en France il y a un mois ?

Theara : Je suis diplômée d’une licence d'éducation en anglais (aussi appelée « anglais d'enseignement ») de l’Université des Ressources Humaines de Phnom Penh, au Cambodge. J’ai aussi obtenu l'examen du Code Professionnel de Pédagogie des enseignants. Depuis, je suis professeur d'anglais dans une école de la capitale.

Par ailleurs, à titre personnel, j'ai eu plusieurs expériences associatives et bénévoles.

Je suis bénévole à la Youth Coalition for Unity and Development (Coalition de la jeunesse pour l’unité et le développement). J’ai notamment participé à un Parlement fictif des jeunes, à des concours de débats entre jeunes, ainsi qu'à des ateliers de renforcement de capacités en matière de plaidoyer, sur les droits économiques et sociaux, de leadership, sur l’implication des jeunes dans les communautés, ou encore sur la mise en réseau. Enfin, j'ai contribué au lancement des « recommandations des jeunes sur les politiques publiques”.

Je suis par ailleurs Secrétaire au Comfrel (Comité pour l’équité et les élections au Cambodge) de la province de Takeo, au sud de Phnom Penh, et j'ai également été bénévole pendant cinq mois au Centre de documentation du Cambodge pour le projet “Advancing the Rights and Improving the Health Condition of Khmer Rouge Survivors” (Faire progresser les droits et améliorer les conditions de santé des survivants des Khmers rouges).

Enfin, j’ai participé avec succès à un bootcamp en ligne dédié aux jeunes sur la liberté d’expression, la gouvernance démocratique et la citoyenneté active. J'ai aussi eu l'occasion de prendre la parole lors l’émission de radio de Voices Of Cambodia aux côtés d'ONG cambodgiennes sur ces thématiques.

Qu'est-ce qui t'a amené à vouloir faire un volontariat en France, en particulier centré sur l'Education à la Citoyenneté et à la Solidarité Internationale (ECSI) et les Objectifs de Développement Durable (ODD) ?

Theara : En tant qu'enseignant d'une part et bénévole sur les sujets de gouvernance, de démocratie et de liberté d'expression d'autre part, je suis passionné par les enjeux d'éducation et par l'Histoire. J'avais donc naturellement envie de m'engager dans des actions d'ECSI auprès de publics jeunes et scolaires, et sur les ODD 4 (éducation de qualité : veiller à ce que tous puissent suivre une éducation de qualité dans des conditions d'équité et promouvoir les possibilités d'apprentissage tout au long de la vie) et 16 (paix, justice et institution efficaces : promouvoir l'avènement de sociétés pacifiques et ouvertes aux fins du développement durable). Mais j'espère aussi pouvoir développer mes propres connaissances sur les autres ODD et champs d'action investis par Gescod au cours de mon volontariat, notamment l'ODD 6 – garantir l'accès de tous à l'eau et à l'assainissement et assurer une gestion durable des ressources en eau – qui est l'ODD phare du projet « Amélioration de l'accès à l'eau potable et à l'assainissement sur le bassin du Stung Sen au Cambodge », que Gescod accompagne aux côtés de partenaires français et cambodgiens*.

*NDLR : il s'agit de la coopération décentralisée entre le Syndicat des Eaux et de l'Assainissement Alsace-Moselle, le Syndicat Intercommunal des Energies de la Marne, Tonle Sap Authority, l'Association d'Eau potable du bassin du Stung Sen et Gescod, soutenue par l'Agence de l'Eau Rhin-Meuse et le ministère de l'Europe et des Affaires Etrangères.

De quelle préparation as-tu pu bénéficier au Cambodge avant ton départ en France ?

Theara : France Volontaires a convié l'ensemble des volontaires du programme REVER Cambodge a une préparation au départ à Kep, dans le Sud du Cambodge. Nous avons participé à des ateliers thématiques sur le volontariat international, sur la vie quotidienne en France, sur l'interculturalité, ou encore sur les ODD. J'ai aussi pu passer en revue ma fiche mission avec mes tuteurs de France Volontaires, pour m'assurer que j'avais bien compris ce qui serait attendu de moi une fois arrivé en France. Enfin, nous avons eu l'opportunité de rencontrer et échanger avec d'anciens volontaires cambodgiens revenus de France et des volontaires français engagés au Cambodge auprès d'ONG françaises et de leurs partenaires locaux. Cela nous a bien aidés dans notre réflexion sur le volontariat et notre parcours d'engagement en France.

En parallèle, j'ai également pu démarrer l'apprentissage de la langue française à l'Institut Français du Cambodge, qui a dispensé des cours aux volontaires du programme pendant deux mois avant le départ. Cela m'a donné de bonnes bases pour m'intégrer à mon arrivée ici, et j'ai le sentiment que je progresse de jour en jour, grâce aux exercices que je fais quotidiennement de mon côté mais aussi au contact des collègues et des autres volontaires de Gescod qui m'apprennent plein de nouvelles expressions !

Maintenant que tu en sais davantage sur les missions qui t'attendent dans le cadre de ton volontariat, peux-tu nous dire quelles sont celles qui te motivent particulièrement ?

Theara : j'ai particulièrement hâte de rentrer dans le vif du sujet sur l'animation et l'ECSI, de sensibiliser les jeunes et le grand public aux ODD par des animations pédagogiques et de contribuer à leurs réflexions sur la solidarité internationale lors de certains événements que Gescod organise. Nous avons déjà commencé à explorer quelques pistes, avec mes collègues de Gescod, de manifestations dans lesquelles je pourrais apporter un témoignage ou contribuer en tant que jeune cambodgien. Il y a notamment beaucoup d'événements à venir entre septembre et décembre : des groupes de travail thématiques ou pays dédiés aux associations du Grand Est, le Festival Alimenterre, le Rallye des Solidarité ou encore le Marché du Monde Solidaire. J'espère aussi pouvoir mener quelques sensibilisations en milieu scolaire à la rentrée de septembre. Nous avons les trois mois d'été pour mettre tout cela en place.

Et qu'attends-tu de cette mission de volontariat au-delà des missions qui te sont confiées ?

Theara : En fait, ce que j’attends de mon volontariat c'est d'évoluer dans environnement de travail accueillant, qui me permette de m'épanouir, de me former, et d'apprendre via une diversité de sources d'information, à la fois en contribuant à l'organisation d'ateliers et d'animations, mais aussi en tant que simple participant aux activités développées par mes collègues. J'espère aussi découvrir de nouvelles cultures, de nouvelles personnes, et me découvrir moi-même. Essayer de mieux comprendre le monde qui m’entoure. Je développerai à coup sûr de nouvelles compétences au sein de Gescod. Et bien sûr, si cette expérience interculturelle, loin de chez moi, pouvait m'aider à mon retour au Cambodge à trouver un emploi passionnant dans le domaine de l'engagement et de la solidarité, cela serait un plus. Le volontariat est à mon sens un chemin qui peut m'aider à saisir de belles opportunités dans le futur.

Après un mois en France, comment te sens-tu ? Comment s'est passée ton installation à Strasbourg ?

Theara : Mon installation à Strasbourg se passe bien, je m'y sens en sécurité et je bénéficie d’un cadre de vie confortable. J'ai bien sûr dû faire face à quelques défis au départ, par exemple pour m'orienter en ville et communiquer avec les habitants car je ne parle pas encore bien français, ou encore pour m'adapter aux habitudes alimentaires locales et au coût de la vie, bien plus élevé en France qu'au Cambodge ! Mais j'ai appris beaucoup de choses sur les habitudes locales, sur la vie quotidienne, et je me sens de plus en plus à l'aise et confiant pour évoluer dans ma nouvelle vie strasbourgeoise. Ce que j'aime ici, c’est qu’il y a beaucoup d’arbres et qu'on se déplace facilement grâce aux transports en commun. C'est une ville avec un environnement naturel de qualité, une métropole verte. La présence des institutions européennes en fait aussi un lieu où sont partagées des valeurs communes d'humanisme et de liberté, qui me donnent encore plus envie de d'agir et de m'engager dans le cadre de mon volontariat !